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Cliquez ici pour écouter ma chronique du 25 mai à L’après-midi porte conseil.

Du 24 au 27 mai se tient, à Montréal, le 8e congrès annuel de la Société canadienne de recherche sur les produits de santé naturels (SCRPSN, www.nhprs.ca) sous le thème: «Les approches multidisciplinaires dans les thérapeutiques modernes: Joindre nos forces pour un avenir plus en santé» (Multidisciplinary Approaches to Modern Therapeutics: Joining Forces for a Healthier Tomorrow).

Il s’agit d’un événement important, voire historique, puisque c’est le premier congrès où des chercheurs spécialisés dans le domaine des substances d’origine naturelle se joignent à la crème de la recherche pharmaceutique au Canada. En effet, la SCRPSN s’associe cette année à trois autres sociétés de recherche du monde pharmaceutique: la Société canadienne de sciences pharmaceutiques (http://www.cspscanada.org/), la Société canadienne de pharmacologie et de thérapeutique (http://www.pharmacologycanada.org/) et le chapitre canadien de la Société sur les libérations contrôlées (http://www.cc-crs.com/index.htm) (libération de médicaments, pas de prisonniers…).

Cette association est le reflet du changement de mentalité qui s’opère dans le monde pharmaceutique. Elle prouve bien que les produits de santé naturels gagnent en crédibilité, en science et en développement.

Sujets abordés

Les sujets abordés touchent différents champs de recherche (sciences fondamentales, études cliniques, ethnobotanique) et sont très variés, allant de la pharmacogénomique (l’influence des gènes sur les médicaments et l’inverse, ou l’individualisation de la thérapie) aux nouveaux traitements d’origine naturelle pour le diabète. Voici un aperçu de ces sujets:

· Diabète et maladies métaboliques

· Cognition et maladies neurodégénératives

· Pharmacovigilance et études post mise en marché

· Pharmacologie polymoléculaire (plusieurs molécules actives dans un même produit – par opposition à pharmacologie classique à une molécule à la fois)

· Système immunitaire et infections

· Orthopédie et maladies des os

· Interactions

· Herboristerie contemporaine

· Hypertension

Je ne toucherai pas à tous les sujets dont il est question au congrès, il y en a bien trop, mais voici ceux qui ont le plus attiré mon attention.

Pharmacovigilance

La pharmacovigilance est la surveillance des effets nocifs d’un produit pharmaceutique après sa mise en marché. Vous rappelez-vous de Vioxx? C’est l’exemple parfait d’un médicament dont le retrait, en 2004, est le résultat de cette surveillance. La même chose existe pour les produits de santé naturels (PSN). Le kava en est un exemple puisqu’il a été retiré du marché dans les années 1990 suite à des problèmes de toxicité hépatique (on a découvert plus tard que ces problèmes apparaissaient dans certains produits seulement, à cause d’une mauvaise méthode d’extraction). Des efforts de systématisation de cette pharmacovigilance pour les PSN ont lieu à Cuba (Diadelis Remirez et Giselle Gimenz, National Centre for Pharmacoepidemiology) et chez nous, à la Direction des produits de santé naturels de Santé Canada (Mano Murty, Marketed Health Product Directorate). Des structures sont mises en place pour surveiller la consommation et répertorier les effets adverses (et, lorsque possible, les prévenir) des PSN. Un plus pour la population et pour l’industrie.

Pharmacologie polymoléculaire: bioinformatique et métabolomique

Un des plus grands problèmes des sciences pharmacologiques et des produits thérapeutiques complexes, comme les plantes médicinales, est que l’impact sur le système biologique humain n’est jamais simple. La fameuse logique «une molécule – un récepteur – un effet», qui a longtemps servi de base à l’élaboration des médicaments, est rarement réaliste. Une molécule peut être métabolisée en différents métabolites dont les actions sont différentes; des récepteurs de même type peuvent être la cible de plusieurs variétés de molécules en même temps; etc. La métabolomique (de métabolisme et ‘omique’ = suivi de ce qui se passe dans le corps) est l’étude, à l’aide d’ordinateurs très puissants et de bases de données immenses (bioinformatique), de ces systèmes complexes dans lesquels le nombre de molécules dépasse la capacité d’analyse usuelle. Ces nouveaux outils permettent d’étudier et de comprendre, en temps réel, l’impact simultané de plusieurs substances ainsi que l’évolution des multiples métabolites dans le corps humain. La métabolomique permet même de déceler si une personne a consommé tel médicament, ou de l’alcool.

Solutions prometteuses pour maladies graves

Certaines maladies sont particulièrement dévastatrices, soit parce qu’elles sont fatales et dramatiques, comme le cancer du pancréas, soit parce que les traitements actuels sont toxiques et comportent de nombreux effets secondaires difficiles à tolérer.

Voici une preuve que les plantes, même les plus banales, peuvent receler des trésors. De nouvelles recherches montrent qu’un extrait de racine de pissenlit (Taraxacum officinale), dans un modèle in vitro, peut tuer certaines lignées cellulaires de cancer du pancréas, un cancer des plus meurtrier avec seulement 1% à 4% de survie à 5 ans. Le pissenlit est une plante alimentaire et médicinale qui est utilisée comme tonique digestif et dépuratif pour le foie depuis des millénaires, et ce sans toxicité (travaux de Chochkeh M, Asl PA, Ovadje P, Pandey S. Université de Windsor, Ont.).

Dans une seconde recherche, des membres du même laboratoire ont travaillé sur le même extrait et ont démontré la capacité de la racine de pissenlit d’entrainer la mort naturelle (apoptose) des cellules de leucémie chronique (leucémie myélomonocytique chronique) (travaux de Ovadje P, Hamm C, Pandey S. Université de Windsor, Ont.).

Des plantes pour le diabète

À l’Université de Montréal, l’équipe du Dr Pierre Haddad, en association avec d’autres universités canadiennes, fait un travail de longue haleine qui mérite d’être souligné. L’équipe des IRSC (Instituts de recherche en santé du Canada) sur les médecines autochtones antidiabétiques travaille depuis des années à trouver, dans les plantes médicinales du Grand Nord, des outils efficaces pour traiter le diabète endémique chez les populations des Premières Nations.

L’étude commence par un travail d’ethnobotanique consistant à œuvrer main dans la main avec les guérisseurs et les sages (elders) des communautés pour identifier les plantes potentiellement utiles pour les symptômes du diabète. Ensuite, l’identification des composés actifs à l’aide des technologies de pointe permet de valider ces usages et d’identifier les mécanismes d’action dans des modèles cellulaires. Des études in vivo ont été développées pour établir l’efficacité et la sécurité des extraits de ces plantes.

D’autres recherches ont aussi été entreprises pour établir le meilleur mode d’extraction. Traditionnellement, tous les extraits de plantes étaient effectués dans l’eau (décoction, infusion), mais l’alcool est souvent plus efficace. Il semble par contre que, dans le cas présent, le mode traditionnel soit tout aussi efficace et mieux apprécié par les populations cibles. Finalement, 17 plantes sont maintenant en phase d’étude chez les humains.

Ginseng et schizophrénie

Le ginseng semble donner des résultats très intéressants chez des patients atteints de schizophrénie. Un extrait particulier, le Ginsana G115, a montré la capacité d’améliorer le traitement pharmaceutique en réduisant les effets adverses. L’étude a comparé l’efficacité de deux doses différentes (200mg et 100mg) et d’un placebo. La dose de 200mg, avec une amélioration de 50%, s’est avérée beaucoup plus efficace que la petite dose ou que le placebo.

Petits fruits et hypertension

En provenance de Nouvelle-Écosse, des recherches montrent que certains petits fruits d’ici [bleuet (Vaccinium corymbosum), canneberge (Vaccinium macrocarpon), airelle rouge (Vaccinium vitis-idaea), camarine noire (Empetrum nigrum), plaquebière ou chicouté (Rubus chamaemorus)] peuvent aider à réduire l’hypertension par un mécanisme similaire à certains médicaments (les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine [IECA] comme le Vasotec). L’airelle rouge et la canneberge semblent être les plus efficaces.

Mon coup de cœur

Pour moi, le haut lieu de ce congrès est le développement conjoint de projets de recherche par des herboristes cliniciens traditionnels et des chercheurs. Trois herboristes pionniers font la démonstration de la valeur de ce type de collaboration essentielle. David Winston (herboriste clinicien et ethnobotaniste, Herbal Therapeutic Research Library, É-U), Daniel Gagnon (herboriste clinicien, Herbs etc., New Mexico, É-U) et Marie Provost (herboriste traditionnelle, La Clef des Champs, Val David, Québec) présentent chacun les projets dans lesquels ils sont impliqués. Ils nous montrent les lacunes observées dans des études de grandes envergures et expliquent que les erreurs et mauvais résultats sont souvent causés par un manque de compréhension de l’herboristerie.

Souhaitons que cette collaboration se répande et entraine un plus grand niveau de compréhension et un meilleur usage des plantes.

Et la législation?

J’ai aussi parlé en ondes de la législation canadienne sur les PSN. J’en ai déjà glissé un mot, entre autres dans Retrait de produits naturels des pharmacies, mais je ferai une chronique plus détaillée sur ce sujet dans 2 semaines.

9 commentaires

  1. Bonjour , j ai commandé du collazymes sur un site canadien PURE SANTÉ NATURELLE et je voudrais savoir s il y a des effets nocifs dans ce produit qui contient de l hydrolisat de collagène.
    Merci pour votre réponse . Cordialement. MARYSE RYGAIL

    1. Bonjour Maryse,
      Je n’ai pas la formule exacte du produit. Donc, difficile de me prononcer. Le collagène est d’abord et avant tout de la gélatine. Il ne devrait donc pas donner d’effets adverses importants. Les enzymes de la formule pourraient donner de l’irritation gastrique.
      Sous toute réserve, puisque les dosages ne sont pas écrits.
      Santé!

  2. Je suis étudiante au Chimie des produits naturels. C’est un cours offert seulement à l’université du Qc à Chicoutimi qui vise a instruire les gens vers la fabrication de produits médicinaux à partir des plantes. Cette article me montre que les gens commencent à ce rendre compte que la synthèse n’est pas la seul manière d’obtenir des médicaments efficace et j’en suis bien heureuse:)

  3. Fantastique !

    Moi qui prépare justement une conférence intitulée : concilier médecine moderne et alternative le 7 juin prochain au centre St-Pierre…

    Plusieurs paramètre limitent les collaborations médecine moderne et alternative, les paradigmes scientifiques, les disparités de financement des recherches et la nature même de ces recherches.

    Cependant, la pharmaco polymoléculaire se rapproche de l’action des plantes. Je me demande toutefois qui financera des recherches pour démontrer l’usage des plantes médicinales, produits qui n’appartiennent à personne en particulier (n’en déplaise à Monsanto).

    En terminant, j’ajoute que tout ne peut pas faire l’objet de recherches systématiques et qu’il nous faudra apprendre à naviguer dans les eaux grises si nous voulons éviter que les frais de santé n’augmentent en flèche et que le système ne se développe que pour les mieux nantis.

    Avez-vous besoin d’une recherche pour vous confirmer qu’une bonne salade de votre jardin et qu’un poulet bio vous fait plus de bien qu’un sandwich pain blanc et « baloné » ?

    1. Bonjour Jonathan,
      Très juste, le nerf de la guerre n’est pas la volonté des chercheurs, mais bien la finance derrière. Qui financera une ou plusieurs études qui n’ont pour but que la compréhension et l’usage informé des citoyens?
      Même les gouvernements financent des projets qui sont orientés produits. Ils ne financent que très rarement des études qui ne portent pas sur un modèle d’affaires. Saviez-vous qu’il n’a jamais été démontré contre placebo que respirer est bon pour la santé? 🙂
      Au plaisir,
      Santé!

  4. Très encourageant, il n’y sûrement pas qu’une voie pour soigner et guérir comme on le fait maintenant.

  5. Bonjour Jean-Yves. Merci pour l’info.
    Cette collaboration est bien (en principe)….mais en même temps un peu inquiétante!!
    Depuis plus de 30 ans je soigne ma famille naturellement… (depuis plus de 16 ans je suis naturopathe)…..et malgré le ‘progrès’ dans ce domaine depuis les dernières années, la seule chose qui semble changer est les restrictions imposée par le gouvernement au sujet des remèdes traditionnels. Imaginez si Big Pharma s’implique de plus en plus dans la ‘recherche’ et éventuellement dans la ‘’fabrication’’ de produits naturels ($$$ pour eux); avec leurs vision plutôt ‘chimique’, en peu de temps, nous allons avoir sur le marcher des remèdes dites ‘naturels’ ‘’chimifiés’’!!! (Je vois ce phénomène déjà en pharmacie!!!) Aussi, je me demande bien QUI va conseiller au grand public une fois que Big Pharma s’implique!!!??
    Les naturopathes travaillent depuis des siècles pour enseigner aux peuples une hygiène de vie préventive en utilisant les facteurs naturels de santé (qui inclus entre autres les remèdes tel que les plantes médicinales, les vitamines et minéraux, etc.). Pouvons nous espérer une reconnaissance au près de notre gouvernement en temps que spécialistes des PSN?
    Mais enfin, un peu de positivisme, comme écrit Daniel Kieffer, naturopathe européen, ‘Il n’est plus temps de se quereller; plus temps de tirer sans cesse la couverture à soi. Parlons en termes de complémentarité.’’
    En attendant votre prochaine chronique,
    Bonne santé!!

  6. Merci, très intéressant pour nous.
    Est-ce que des médecins participent aussi au congrès?
    Se pourrait-il que nous ayons davantage de médecins qui prescrivent des produits naturels ou homéopathiques comme en Europe ? les pharmaciens seront-ils plus renseignés, si ils le veulent bien ou le devront-ils?
    Pour le moment, l’important pour nous, c’est d’être mieux renseignés et la chance que nous avons c’est que vous le faites pour nous, MERCI !!!

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