Dans ce second article sur le cancer de la prostate [voir aussi Pour hommes seulement (4e partie)] et dans le prochain, nous regarderons succinctement les données sur le curcuma, le soya (isoflavones et/ou légumineuses) et la graine de lin, le thé vert et la vitamine D. L’origine de ces données est très souvent épidémiologique, in vitro (mécanisme d’action) ou in vivo, mais rarement clinique (chez l’humain). Il n’est donc pas encore possible de recommander un produit spécifique pour traiter le cancer. Par contre, il est intéressant de suivre l’évolution des recherches. De plus, malgré le manque de preuves cliniques, on peut facilement incorporer ces ingrédients dans nos habitudes alimentaires et, qui sait, se protéger d’avantage contre ce fléau.
Curcuma
Les curcuminoïdes sont les pigments jaunes du curcuma (Curcuma longa, turmeric en anglais). Ces composés sont des antioxydants très puissants qui ont des propriétés anti-inflammatoires notables.(1) Cependant, au-delà de ces attributs, les curcuminoïdes démontrent des effets très intéressants dans la lutte contre les cancers, en particulier contre le cancer de la prostate.
Plusieurs recherches ont montré que la curcumine (le principal curcuminoïde) inhibe le cancer à plusieurs étapes de son développement. Ainsi, la curcumine agit dans les étapes d’initiation, de formation et de progression des tumeurs.(2)
Pour le cancer de la prostate, plus spécifiquement, le curcuma augmente la sensibilité des cellules au TRAIL (tumor necrosis factor related apoptosis-inducing ligand), un facteur impliqué dans l’apoptose (mort cellulaire naturelle programmée).(3) Dans toutes les cellules cancéreuses, l’apoptose est déréglée, ce qui fait que ces cellules vivent beaucoup plus longtemps. Le curcuma favorise donc la mort des cellules cancéreuses.
De plus, la curcumine augmente la sensibilité des cellules cancéreuses à la radiothérapie.(4) Ce dernier effet pourrait bien montrer la voie vers une synergie de traitement nutrition – radiothérapie qui augmenterait l’efficacité et améliorerait la qualité de vie du patient.
Soya
Dans un groupe de 28 hommes diagnostiqués avec un cancer de la prostate, la consommation régulière de soya a aidé à diminuer le PSA (PSA = antigène prostatique spécifique; un taux élevé de PSA suggère un diagnostic de cancer de la prostate). Ces hommes ont consommé un pain spécialement fabriqué contenant 50g de résidus de soya, associés ou non à 20g de graines de lin. Dans les 2 groupes (soya et soya/lin), les différentes mesures du PSA ont diminué de façon importante. Par exemple, le PSA total a diminué de 12,7%, versus une augmentation de 40% dans le groupe placebo (pain de blé) (P= 0,02).(5)
La génistéine, une isoflavone du soya, est un puissant agent de chemoprevention. Elle inhibe la prolifération et augmente l’apoptose des cellules cancéreuses in vitro et in vivo (xénogreffes chez la souris).(6)
Le soya fait l’objet de plusieurs études. Il est probable que plusieurs des effets qu’on lui reconnaît s’appliquent aussi aux autres légumineuses, malgré qu’elles soient moins riches en phytoestrogènes. Un argument en leur faveur: il y a énormément de soya génétiquement modifié sur le marché alors qu’il y a très peu d’OGM dans les autres légumineuses…
Curcuma et soya
Il semble que la consommation d’une combinaison d’extraits de soya et de curcuma augmente les effets sur l’inflammation, le PSA et l’expression des récepteurs androgéniques. 100 hommes ayant eu un diagnostic de cancer et une biopsie de la prostate ont été recrutés pour recevoir soit un PSN contenant 40mg d’isoflavones de soya et 100mg de curcumine, soit un placébo, sur une période de 6 mois. Les taux de PSA et l’expression des récepteurs aux androgènes ont baissé significativement dans le groupe ayant reçu le traitement, et plus particulièrement dans le sous-groupe qui avait un PSA plus élevé. Dans le groupe placébo, la diminution a été beaucoup moins importante.(7)
Graine de lin
Une étude clinique s’est penchée sur la graine de lin. Durant 34 jours, 25 patients ont consommé 30g de graines de lin tout en restreignant leur apport en gras à seulement 20%. Tous les paramètres de cancer mesurés (index androgène, PSA et, surtout, index de prolifération du cancer) ont été abaissés de façon significative.(8)
Le même protocole d’étude clinique a été repris chez 15 hommes durant 6 mois. Les résultats confirment les données de la première étude. De plus, pour au moins un des patients, le PSA s’est complètement normalisé.(9)
La semaine prochaine: thé vert, vitamine D et autres antioxydants
Références :
- Basnet P, Skalko-Basnet N. Curcumin: an anti-inflammatory molecule from a curry spice on the path to cancer treatment. Molecules. 2011 Jun 3;16(6):4567-98. Review. PubMed PMID: 21642934.
- Duvoix A, Blasius R, Delhalle S, Schnekenburger M, Morceau F, Henry E, Dicato M, Diederich M. Chemopreventive and therapeutic effects of curcumin. Cancer Lett. 2005 Jun 8;223(2):181-90. Review. PubMed PMID: 15896452.
- Deeb D, Xu YX, Jiang H, Gao X, Janakiraman N, Chapman RA, Gautam SC. Curcumin (diferuloyl-methane) enhances tumor necrosis factor-related apoptosis-inducing ligand-induced apoptosis in LNCaP prostate cancer cells. Mol Cancer Ther. 2003 Jan;2(1):95-103. PubMed PMID: 12533677.
- Chendil D, Ranga RS, Meigooni D, Sathishkumar S, Ahmed MM. Curcumin confers radiosensitizing effect in prostate cancer cell line PC-3. Oncogene. 2004 Feb 26;23(8):1599-607. PubMed PMID: 14985701.
- Dalais FS, Meliala A, Wattanapenpaiboon N, Frydenberg M, Suter DA, Thomson WK, Wahlqvist ML. Effects of a diet rich in phytoestrogens on prostate-specific antigen and sex hormones in men diagnosed with prostate cancer. Urology. 2004 Sep;64(3):510-5. PubMed PMID: 15351581.
- Bemis DL, Capodice JL, Desai M, Buttyan R, Katz AE. A concentrated aglycone isoflavone preparation (GCP) that demonstrates potent anti-prostate cancer activity in vitro and in vivo. Clin Cancer Res. 2004 Aug 1;10(15):5282-92. PubMed PMID: 15297432.
- Ide H, Tokiwa S, Sakamaki K, Nishio K, Isotani S, Muto S, Hama T, Masuda H, Horie S. Combined inhibitory effects of soy isoflavones and curcumin on the production of prostate-specific antigen. Prostate. 2010 Jul 1;70(10):1127-33. PubMed PMID: 20503397.
- Demark-Wahnefried W, Price DT, Polascik TJ, Robertson CN, Anderson EE, Paulson DF, Walther PJ, Gannon M, Vollmer RT. Pilot study of dietary fat restriction and flaxseed supplementation in men with prostate cancer before surgery: exploring the effects on hormonal levels, prostate-specific antigen, and histopathologic features. Urology. 2001 Jul;58(1):47-52. PubMed PMID: 11445478.
- Demark-Wahnefried W, Robertson CN, Walther PJ, Polascik TJ, Paulson DF, Vollmer RT. Pilot study to explore effects of low-fat, flaxseed-supplemented diet on proliferation of benign prostatic epithelium and prostate-specific antigen. Urology. 2004 May;63(5):900-4. PubMed PMID: 15134976.
Bonjour Jean-Yves,
J’aime saupoudrer un mélange de graines de lin et de chia sur ma salade. Dernièrement ma fille est venu souper à la maison et en constatant que je mettais ce mélange sur ma salade m’a dit qu’une amie lui aurait dit que les hommes devaient éviter de manger les graines de chia car cela ne serait pas bon pour la prostate, mais je n’en sais pas plus. Donc avant de changer quoi que ce soit dans mon alimentation, j’aimerais avoir ton opinion.
Merci !
Bonjoru Jean-Pierre
Continuez à faire ce que vous faites.
Il n’y a aucun lien solide entre la consommation de graine de chia (ou de lin) et un quelconque risque pour la prostate.
Je crois savoir d’où vient ce préjugé.
Dans une recherche (où il n’y avait pas de supplément pris), les chercheurs ont constaté que dans les cellules de cancer de la prostate, il semblait y avoir un taux plus élevé d’oméga 3 végétaux. Donc, ils ont conclu qu’il ne fallait pas prendre ces oméga 3 de peur d’augmenter les risques de cancer.
Il faut dire aussi que dans cette étude, les actes gras trans semblaient conférer une protection… 🙂
Santé!
Bonjour Yves,
Dans cet article, il est mentionné que le soya serait bon pour les hommes et en particulier pour leur prostate. Outre le tofu, est-ce que le lait de soya peut-être considéré comme mode de consommation adéquat du soya ? Et qu’en est-il de ces histoires que le lait de soya contient des hormones qui pourraient faire croître les seins des hommes ? Est-ce un mythe ou une possibilité ? En lisant ton article « Soya, phytoestrogènes et cancer du sein » j’en conclus que c’est un mythe, mais ai-je bien compris ?
Merci
PS Tu es ma première référence en santé globale sur le web. Merci de partager tes connaissances avec nous !
Bonjour Jean-Pierre
Il y a un grand mouvement pour discréditer le soya. À part les OGM, qu’il faut, à mon avis, fuir, le soya est tout à fait sécuritaire. Les fameuses phytoestrogènes sont en fait utiles pour normaliser les récepteurs hormonaux chez Mr et Mme. Elles préviennent nombres de cancer, incluant celui de la prostate.
De plus, les phytoestrogènes ne sont pas des œstrogènes parce que, si elles en étaient, les hommes du continent asiatique auraient des seins et seraient stériles… pas tout à fait le cas, n’est-ce pas ?
Le lait de soya n’est pas la meilleur source mais en contient. Attention à la quantité de sucre ajouté.
Santé!
voici une recette pour absorber la curcumine,est de melanger une cuillere a soupe dans 12,5 cl d’eau bouillante,laisser un peu refroidir et on aura une solution de 12%.la boire dans les 4 heures.Tchin
Bonsoir,
Que penses-tu de l’huile de graine de lin?
Mon mari avait du cholestérol élevé il y a quelques années. Son docteur a voulu
lui donner des médicaments et il a refusé. Il a donc pris de l’huile de graines de lin
et le cholestérol est revenu à la normale. Il fait de l’exercice plusieurs fois semaine et nous mangeons beaucoup de fruits et légumes, poissons et de la viande à l’occasion. J’ai lu un article disant que l’huile de graines de lin pouvait être toxique
pou le foie. Donc cette année, il a changé pour les graines de lin fraîchement moulues à chaque matin. Il devrait avoir un test d’ici peu et il sera intéressant
de voir le résultat.
J’aimerais avoir ton opinion.
Merci!
Maryse