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Le système de médecine fondé sur des données probantes (evidence based medicine) se base principalement sur les études cliniques publiées sur un sujet (médicament, technique médicale, test, protocole, etc.) pour évaluer son efficacité et sa valeur thérapeutique. Mais qu’arrive-t-il quand certaines études ne sont pas publiées?

C’est justement la question que s’est posée un groupe d’experts.(1,2) On le sait depuis un certain temps, les promoteurs d’études ont tendance à ne pas publier celles qui n’ont pas les résultats attendus.(3) Depuis plusieurs années, on a en effet documenté, recherches à l’appui, que les études commanditées sont en grande majorité positives et que les études négatives ou défavorables, pourtant essentielles à la compréhension des effets du produit ou de la thérapeutique étudié, restent cachées dans les tiroirs des compagnies.(3)

Comment avoir accès à ces données?

C’est là que la proposition de Peter Doshi (fellow post doctoral de la faculté de médecine de l’université John Hopkins) et son équipe devient intéressante. Ces experts proposent de contacter toutes les compagnies susceptibles d’avoir de telles études non publiées et de leur demander leurs intentions de publication dans les 30 jours. Si ces compagnies n’ont pas l’intention de publier, il propose alors que l’intégralité des données tombe dans le domaine public. Ainsi, n’importe quel chercheur aurait le droit de les publier à son compte.

Cette approche est fort intéressante. En effet, en enlevant le filtre à la publication, l’équilibre de l’information sera meilleur et la compréhension de l’efficacité réelle des produits sera accrue.

Mise en marché d’un produit

Voici ce qui se produit généralement lors du développement d’un nouveau produit: Une compagnie développe un médicament pour traiter la maladie X. Elle procède ensuite aux tests nécessaires pour monter le dossier du produit et obtenir l’approbation des organismes règlementaires pour sa mise en marché. Une fois cette autorisation obtenue, la compagnie effectue d’autres études plus importantes dans le but de démontrer l’avantage de son produit par rapport aux autres options de traitement disponibles pour la maladie X. Oui mais…

Si cette même compagnie n’a présenté qu’une partie de l’information (la partie qui lui plaît) à la direction de la Santé, le produit approuvé est-t-il réellement efficace? De même, si les données cliniques négatives ou encore les données de toxicologie sont tronquées, comment le praticien peut-il prévoir l’effet (ou les effets) du médicament?

Rappelons-nous le cas du Vioxx, un anti-inflammatoire de la compagnie Merck, ou encore le Redux, un médicament pour la perte de poids de la compagnie Servier. Les deux ont été retirés pour toxicité. Dans les deux cas, plusieurs sont d’avis que les risques étaient connus des fabricants…

La proposition de Dr Doshi a été endossée par le British Medical Journal et par PLOS (Public Library of Science) Medicine. Espérons que cette approche gagnera en popularité et que les études invisibles deviendront bientôt du domaine public. Nous avons tous à y gagner.

Santé!

Références:

  1. Doshi P, Dickersin K, Healy D, Vedula SS, Jefferson T. Restoring invisible and abandoned trials: a call for people to publish the findings. BMJ. 2013 Jun 13;346:f2865. doi: 10.1136/bmj.f2865. PubMed PMID: 23766480.
  2. Communiqué de presse : http://www.bmj.com/press-releases/2013/06/13/experts-propose-restoring-invisible-and-abandoned-trials-“-correct-scienti
  3. Hopewell S, Loudon K, Clarke MJ, Oxman AD, Dickersin K. Publication bias in clinical trials due to statistical significance or direction of trial results. Cochrane Database Syst Rev. 2009 Jan 21;(1):MR000006. doi: 10.1002/14651858.MR000006.pub3. Review. PubMed PMID: 19160345.

11 commentaires

  1. Oui, merci mais qui ne savait pas encore que l’on tend à taire les aspects d’une vérité qui ne nous avantagerait pas vraiment? Que l’on omet presque toujours ces petits détails qui nous ferait passer pour moins fine que l’on veut le paraître! Nous faisons tous cela, à plus petite échelle, mais nous le faisons tous! C’est dur,dur d’être 100% objectif, c’est pourquoi il faut prendre toutes les études et tout ce qu l’on nous promet avec un grain de sel. Habituellement, il n’y a rien de mieux que l’expérience personnelle pour se faire une idée d’un produit ou d’une nouvelle idéologie!
    De toute façon j’aime beaucoup vos articles, et je les laisse trainer partout, à la maison, dans la salle d’attente de la clinique où je travaille. Merci!

  2. J’ai lu récemment le livre Bad Pharma de Ben Goldacre où sont expliquées plusieurs ruses des compagnies pharmaceutiques. Les études non publiées et leurs effets y étaient bien expliquées. Ca fait réfléchir.

  3. Super, que tu as du courage de les dénoncer et de dire la vérité pour nous protéger. Continuer ton beau travail. Je le savais que les grandes compagnies qui veulent nous montrer les avantages et en cachant des désavantages. Voilà vos sources nous prouve encore plus.

    MHB ND.A.

  4. Bonjour M. Dionne. J’espère que ces companies acceptent de nous dévoiler, leurs dossiers secrets. Malheureusement, ils chérissent leurs profits sans tenir compte des consequences. Merci de nous envoyer des articles qui nous font réflèchir. Anna Maria.

  5. Bravo Jean-Yves,
    Maintenant si l’on pouvait faire de même pour les études sur les champs électromagnétiques. Les institutions telles que Santé Canada et l’AFSSET choisissent les études qui montrent leur point de vue et aussi les conseillers des comités. C’est ainsi que l’industrie continue à contrôler les données basées sur « le poids de l’évidence » sans mentionner que le poids est financé par l’industrie; dès qu’on enlève les études financées par l’industrie, comme par magie, le poids de l’évidence se penche sur les effets biologiques non-thermiques.

    Nous sommes en train de nous faire irradier à vie par la source de pollution plus importante et dévastatrice de l’historie de l’humanité et aucun organisme de la santé québécoise ne se prononce contre cette invasion. Ils sont au courant parce que nous les avons informés et demandés de se prononcer et AUCUN a répondu sauf un dentiste « holiste » pour dire qu’il est au courant, mais il n’a pas mobilisé les associations auxquelles il fait partie comme administrateur. L’apathie des organismes « holistes » se joint à celui des citoyens qui continuent à faire confiance soit aux « holistes » comme aux « officielles ».

    La semaine dernière le journal des l’Association des médecins du Canada a publié le conflit d’intérêts entre un membre du conseil de révision du Code 6 et le représentant de la Société Royale du Canada qui supervise la révision du Code 6 et choisit ses membres a répondu « Krewiski est tellement occupé qu’il a probablement oublié de le déclaré (qu’il a travaillé comme consultant pour une compagnie de télécommunication) ». Krewiski et les quatre autres membres en conflit d’intérêts sont toujours au poste.

    L’initiative de Peter Doshi est excellente, si Hydro-Québec suivait cette directive nous saurions pourquoi les monteurs de ligne d’HQ exclusivement développent un cancer du poumon. HQ est assise sur les données et refuse de les partager depuis presque 20 ans : Benedict A. et coll. Association between Exposure to Pulsed Electromagnetic Fields and Cancer in Electric Utility Workers in Quebec, Canada, and France. Am J Epidemiol 1994; 140:805–20.

    Encore une fois merci Jean-Yves et espérons que les actions individuelles comme la tienne vont faire boule de neige et le peuple va se réveiller et exiger d’être convenablement informé pour prendre des décisions éclairées et pas sur les directives de l’industrie.

  6. Les tests des compagnies pharmaceutiques américaines sont de toutes façons toujours faussent. Le principe étant qu’il faille deux recherches positive trouvé pour permettre une approbation d’un nouveau produit. Donc si la compagnie XYZ lance dix série de test ou cent ou mille et que seulement deux donne des résultats positif, la compagnie XYZ est en droit de commercialiser sont nouveau produit. Et ce jusqu’à ce que les plaintes du publique oblige le gouvernement à faire retirer le médicament.

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