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Aux Etats-Unis, le risque (prévalence) de développer un cancer de la prostate chez l’homme est de 154,8 par 100,000 par année.(1) Au Canada, le risque est plus faible, soit 121 par 100,000 hommes par année.(2)

La simple mention du mot «cancer» comporte une importante charge émotionnelle qui, lors d’une discussion sur le sujet, a pour effet d’entraver l’objectivité des interlocuteurs. Le malade, en cherchant tous les moyens de s’en sortir, se retrouve trop souvent au centre du conflit entre les tenants du: «naturel, c’est bon et sans danger» et ceux du «naturel, ce n’est pas prouvé donc dangereux». Ce conflit, au lieu de l’aider à traverser cette épreuve intense, le prive des conseils objectifs et du précieux support dont il a désespérément besoin.

Voici donc, dans un effort d’analyse impartiale, les produits de santé naturels (PSN) et nutriments utiles pour le cancer de la prostate. Pour l’instant, aucune approche de traitement n’est validée. Par contre, les données scientifiques permettent de suggérer des outils de prévention et des adjuvants de traitement.

Nous vous invitons aussi à lire les 3 premiers articles de cette série sur les troubles de la prostate (parus en août et septembre derniers): Pour hommes seulement!, Pour hommes seulement (2e partie) et Pour hommes seulement (3e partie).

Parlons d’abord d’alimentation…

Une étude qui a suivi 9,559 participants de 1994 à 2003 a montré que les apports en omégas 6 pro-inflammatoires (voir L’inflammation sourde, votre pire ennemi) augmentent le risque de cancer de la prostate. Par contre, dans cette étude, les nutriments habituellement associés avec la prévention n’ont pas montré d’effet préventif.(3)

Essayez donc de limiter votre consommation de viande rouge et de produits industriels qui sont les sources les plus importantes d’omégas 6 dans notre alimentation. Votre prostate et votre santé en général ne s’en porteront que mieux.

Lycopène

TomateLe lycopène est le pigment rouge de la tomate, du pamplemousse rose et du melon d’eau. Son effet antioxydant est supérieur à celui du bêta-carotène, mais il ne possède pas d’activité provitamine A. Une étude clinique démontre qu’un apport supplémentaire de lycopène (15mg, 2 fois par jour) freine la progression du cancer de la prostate.(4-6) De plus, des études de cas confirment ce lien protecteur. Un patient souffrant d’un cancer de la prostate a pris du lycopène (10mg/jour) et du palmier nain (300mg, 3 fois par jour). Son cancer a régressé et ses PSA sont revenus à la normale.(7)

Par contre, dans une récente étude chez des afro-américains, la consommation de 30mg de lycopène durant 21 jours n’a pas affecté les marqueurs de cancer.(8)

Les dosages de suppléments suggérés sont de 5 à 10mg par jour pour un effet protecteur, et jusqu’à 30mg par jour avec un historique de cancer. Il est à noter qu’il est possible d’obtenir ces quantités dans la diète. Le lycopène semble être plus biodisponible dans les produits de tomate transformés, comme la sauce tomate, que dans la tomate crue.

Plusieurs PSN pour la prostate tirent profit de cette information et intègrent du lycopène dans leur formulation. Il est primordial de porter attention au dosage. Ainsi, dans un produit complexe pour la prostate, 0,5mg de lycopène ne produira aucun effet!

Portion Quantité de lycopène (9)
1 petite tomate mûre 4 mg
125 ml (1/2 tasse) de sauce tomate 19 mg
30 ml de pâte de tomate 8 mg

Le sélénium

Le sélénium est aussi un nutriment anti-cancer documenté. Dans plusieurs études épidémiologiques, le lien entre l’apport en sélénium et une protection contre le cancer a été établi.(10) Le sélénium est impliqué dans plusieurs réactions métaboliques importantes dans la carcinogenèse.(10,11) On sait que le sélénium est un cofacteur essentiel au glutathion peroxydase, une enzyme très utile dans la protection antioxydante du corps. D’ailleurs, certains manufacturiers de PSN font grand cas du glutathion en oubliant volontairement le fait que, sans le sélénium, le glutathion n’est que partiellement utile. Dans plusieurs études d’intervention, une dose de 200µg de sélénium a été associée à un effet de chémoprévention.(12,13) Cet effet est plus marqué chez les afro-américains que chez les caucasiens.(12)

Lors d’une étude randomisée sur 947 patients ayant une histoire de cancer de la peau (aux États-Unis), le groupe qui a consommé du sélénium en supplément (200µg par jour pendant 4,5 ans) a connu une réduction de 63% du risque de cancer de prostate en plus d’un risque réduit de cancer du poumon et du côlon.(14) L’apport nutritionnel recommandé (ANR) au Canada est établi à seulement 55µg par jour, mais la dose limite est beaucoup plus élevée, soit 1000µg par jour. Des symptômes de toxicité (voir ci-dessous) peuvent apparaître chez environ 10% des personnes qui consommeraient des doses supérieures à la dose limite.

Symptômes de toxicité du sélénium(11)

  • Ongles et cheveux cassants
  • Sensations d’aiguilles dans les membres
  • Irritabilité
  • Nausées & vomissements
  • Haleine à odeur d’ail

Vitamine E

Tout d’abord, à ceux et celles qui s’interrogent sur la vitamine E et la mauvaise presse qui l’a entourée, je recommande la lecture de l’article Toute la lumière sur la vitamine E (particulièrement le paragraphe «La vitamine E tue?»).

Il est démontré qu’un apport alimentaire élevé en vitamine E diminue le risque de plusieurs cancers et de maladies cardiovasculaires.(15) De plus, il existe une synergie entre la vitamine E et le sélénium.(16) Évidemment, la prévention des cancers par la vitamine E seule n’est pas concluante, comme l’a montrée une étude Québécoise sur la prévention d’un second cancer de la tête et du cou.(17) Pour être efficace, la vitamine E, comme tous les antioxydants d’ailleurs, doit être associée à d’autres antioxydants. Dans l’étude SU VI MAX, les participants ont consommé chaque jour durant 8 ans un supplément contenant 120mg de vitamine C, 30mg d’α-tocophérol, 6mg de β-carotène, 100µg de sélénium et 20mg de zinc. Les résultats démontrent une réduction de près de 30% du risque de cancer de la prostate, sans parler des autres bénéfices comme la protection cardiovasculaire.(18)

Prochain article

Le prochain billet de la série Pour hommes seulement couvrira d’autres produits intéressants pour le cancer de la prostate: soya et légumineuses, graine de lin et curcuma.

 

Références

  1. SEER (Surveillance Epidemiologiy and End Results)  Stat Fact Sheets: Prostate. National cancer Institute, USA 2012.
  2. Statistiques sur le cancer de la prostate en bref, Société Canadienne du Cancer 2012.
  3. Kristal AR, Arnold KB, Neuhouser ML, Goodman P, Platz EA, Albanes D, Thompson  IM. Diet, supplement use, and prostate cancer risk: results from the prostate cancer prevention trial. Am J Epidemiol. 2010 Sep 1;172(5):566-77. PubMed PMID: 20693267; PubMed Central PMCID: PMC2950820.  (texte complet accessible gratuitement)
  4. Lu QY, Hung JC, Heber D, Go VL, Reuter VE, Cordon-Cardo C, Scher HI, Marshall  JR, Zhang ZF. Inverse associations between plasma lycopene and other carotenoids  and prostate cancer. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev. 2001 Jul;10(7):749-56. PubMed PMID: 11440960. (texte complet disponible gratuitement)
  5. Giovannucci E, Ascherio A, Rimm EB, Stampfer MJ, Colditz GA, Willett WC. Intake of carotenoids and retinol in relation to risk of prostate cancer. J Natl Cancer Inst. 1995 Dec 6;87(23):1767-76. PubMed PMID: 7473833.
  6. Kucuk O, Sarkar FH, Sakr W, Djuric Z, Pollak MN, Khachik F, Li YW, Banerjee M, Grignon D, Bertram JS, Crissman JD, Pontes EJ, Wood DP Jr. Phase II randomized clinical trial of lycopene supplementation before radical prostatectomy. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev. 2001 Aug;10(8):861-8. PubMed PMID: 11489752. (texte complet disponible gratuitement)
  7. Matlaga BR, Hall MC, Stindt D, Torti FM. Response of hormone refractory prostate cancer to lycopene. J Urol. 2001 Aug;166(2):613. PubMed PMID: 11458084.
  8. van Breemen RB, Sharifi R, Viana M, Pajkovic N, Zhu D, Yuan L, Yang Y, Bowen PE, Stacewicz-Sapuntzakis M. Antioxidant effects of lycopene in African American  men with prostate cancer or benign prostate hyperplasia: a randomized, controlled trial. Cancer Prev Res (Phila). 2011 May;4(5):711-8. PubMed PMID: 21430075; PubMed Central PMCID: PMC3088784. (texte complet accessible gratuitement)
  9. Communication personnelle Leslie Beck, nutritionniste, Toronto.
  10. Thomson CD. Assessment of requirements for selenium and adequacy of selenium status: a review. Eur J Clin Nutr. 2004 Mar;58(3):391-402. Review. PubMed PMID: 14985676.
  11. Selenium Information Sheet http://www.selenium.arizona.edu/INFOse.htm
  12. Vogt TM, Ziegler RG, Graubard BI, Swanson CA, Greenberg RS, Schoenberg JB, Swanson GM, Hayes RB, Mayne ST. Serum selenium and risk of prostate cancer in U.S. blacks and whites. Int J Cancer. 2003 Feb 20;103(5):664-70. Review. PubMed PMID: 12494476.
  13. Duffield-Lillico AJ, Dalkin BL, Reid ME, Turnbull BW, Slate EH, Jacobs ET, Marshall JR, Clark LC; Nutritional Prevention of Cancer Study Group. Selenium supplementation, baseline plasma selenium status and incidence of prostate cancer: an analysis of the complete treatment period of the Nutritional Prevention of Cancer Trial. BJU Int. 2003 May;91(7):608-12. PubMed PMID: 12699469.
  14. Clark LC, Marshall JR. Randomized, controlled chemoprevention trials in populations at very high risk for prostate cancer: Elevated prostate-specific antigen and high-grade prostatic intraepithelial neoplasia. Urology. 2001 Apr;57(4 Suppl 1):185-7. PubMed PMID: 11295623.
  15. Stampfer MJ, Hennekens CH, Manson JE, Colditz GA, Rosner B, Willett WC. Vitamin E consumption and the risk of coronary disease in women. N Engl J Med. 1993 May 20;328(20):1444-9. PubMed PMID: 8479463.
  16. Klein EA. Chemoprevention of prostate cancer. Crit Rev Oncol Hematol. 2005 Apr;54(1):1-10. Review. PubMed PMID: 15780904.
  17. Bairati I, Meyer F, Gélinas M, Fortin A, Nabid A, Brochet F, Mercier JP, Têtu  B, Harel F, Mâsse B, Vigneault E, Vass S, del Vecchio P, Roy J. A randomized trial of antioxidant vitamins to prevent second primary cancers in head and neck  cancer patients. J Natl Cancer Inst. 2005 Apr 6;97(7):481-8. PubMed PMID: 15812073.
  18. Meyer F, Galan P, Douville P, Bairati I, Kegle P, Bertrais S, Estaquio C, Hercberg S. Antioxidant vitamin and mineral supplementation and prostate cancer prevention in the SU.VI.MAX trial. Int J Cancer. 2005 Aug 20;116(2):182-6. PubMed PMID: 15800922.

Photo: en:User:Fir0002 (Wikipédia)

4 commentaires

  1. Bonjour, j’ai fait une prise de sang avec un taux de PSA à 4,80 donc au dessus du taux normal qui est de 4, je dois faire une seconde prise de sang pour contrôler l’evolution de mon taux de PSA , j’ai commencé à prendre 320 mg de prostamol (palmier nain) par jour, j’aimerai savoir si la prise de palmier nain modifie le taux de PSA, ce qui pourrait masquer la détection d’un cancer de la prostate

    1. Bonjour Thierry
      le palmier nain peut avoir un impact mais habituellement sur plusieurs mois, voire années.
      Il ne saurait être négatif ou dangereux
      Il y a aussi d’autres choses à faire, Une consultation privée pourrait être utile : https://www.jydionne.com
      Santé!

    1. Bonjour Daniel,
      Oui, j’ai lu celle-ci et aussi l’étude danoise qui tend vers les mêmes conclusions. Mon commentaire est que ces études sont des observations, pas des interventions. De plus, le taux de vitamine D peut aussi être accessoire. Par exemple, ces personnes prennent leur vitamine D où ? Si ce sont de gros mangeurs de poisson, alors leur taux de vitamine D sera élevé, mais aussi leur taux de mercure et autres toxines environnementales.
      Bref, on ne peut pas, avec simplement une étude, renverser le reste des données. Si, par contre, de tels résultats s’avèrent vrais dans plusieurs populations, notamment dans le Sud, alors il sera temps de remettre en question ce qu’on affirme.
      La santé et la connaissance sont en constante évolution.
      Santé!

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